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Affaire "Pétrole contre nourriture" : la Cour de cassation valide la compétence des juridictions françaises

Pénal - Pénal
26/03/2018
Les juridictions françaises sont compétentes pour connaître du délit de corruption d'agents publics étrangers lorsque celui-ci a été décidé ou organisé sur le territoire national où a également été versé le montant de la rémunération due à ce titre.
Et, dès lors que l'article 113-2, alinéa 2, du Code pénal prévoit qu'une infraction est réputée commise sur le territoire de la République lorsqu'un de ces faits constitutifs a eu lieu sur ce territoire, doivent être déclarées compétentes les juridictions françaises pour juger des faits de corruption d'agents publics étrangers reprochés au gérant de fait d'une société qui a bénéficié d'allocation de pétrole dont la vente ultérieure a donné lieu à des surcharges, et dont le siège social est sur le territoire français, lequel a servi à domicilier en France un compte ouvert en Jordanie destiné à faire transiter des commissions occultes. Telle est la solution énoncée par la chambre criminelle dans un arrêt rendu le 14 mars 2018.

Dans le cadre du programme "Pétrole contre nourriture", instauré par l'ONU pour assouplir l'embargo mis en place à la suite de l'invasion du Koweit par l'Irak, une information a été ouverte des chefs d'abus de biens sociaux, complicité et recel. La saisine du juge d'instruction a été étendue à des faits de corruption active d'agents publics étrangers et de trafic d'influence actif. Il est en effet apparu que la société d'Etat rattachée au ministre du pétrole, et auprès de laquelle les Etats étaient autorisés à effectuer des transactions pétrolières, avait, sur instructions des dirigeants irakiens, à l'insu des contrôleurs de l'ONU, attribué du pétrole irakien, notamment, à des personnes physiques en contrepartie d'une action en faveur du régime irakien et de la levée des sanctions, lesdits allocataires, parmi lesquels MM. B., C., et E., agissant sous couvert de sociétés qu'ils ont fait spécialement agréer pour contracter avec l'entreprise puis revendre du pétrole aux grandes compagnies moyennant des rétrocommissions aux différents intermédiaires.

Pour écarter le moyen de nullité tiré de l'incompétence des juridictions française, les juges d'appel ont relevé que M. B. avait son centre d'intérêt économique à Paris, d'où il a organisé la commercialisation des dotations pétrolières dont il était le bénéficiaire ainsi que le règlement des surcharges dues à ce titre. Également, que chacune des parties avait arrêté en parfaite connaissance de cause le contournement du dispositif onusien interdisant les surcharges et que, dans ce schéma, M. B. et la société agissant à ses côtés, étaient indissociables, en ce sans le premier il n'y aurait pas eu de livraisons de pétrole et sans la seconde, de financement.

La Haute juridiction approuve les juges d'appel.

Par June Perot